On observe que le regroupement dans un contexte Montessori s’organise très souvent autour de l’ellipse, une ou plusieurs fois par jour. Il est notamment l’occasion de faire une transmission collective, une présentation faite par un adulte (une saynète de grâce et courtoisie par exemple) ou par un enfant, il consiste en un moment de partages et de cohésion de groupe.
Regroupement, pour ou contre ?
Maria Montessori n’explicite pas dans ses écrits la mise en place de la routine du regroupement. Sa leçon du silence implique un rassemblement et une activité de tout le groupe mais elle n’a pas de caractère routinier. Pourtant, l’approche Montessori accorde une grande importance à la notion de communauté et de sentiment social mais cela semble se construire en dehors de tout rassemblement régulier.
Si pour certain·es enseignant·es le regroupement est un passage obligé, d’autres s’en affranchissent complètement. Les arguments existent en faveur et en défaveur du regroupement : moments de cohésion de groupe ou proposition inutile non adaptée aux besoins des enfants, c’est à chacun·e de juger selon son contexte. Dans cet article, à l’image des formations délivrées par AIRAM, l’idée est de questionner cette pratique du regroupement afin de faire un choix éclairé et en conscience : quel rôle joue le regroupement pour mon groupe d’enfants ? le regroupement que je propose adopte-t-il une forme bénéfique pour les enfants ? a-t-il une durée adaptée à leur capacité de concentration dans ce contexte ?
Rôles du regroupement en maternelle
Temps social
Assis·es autour de l’ellipse (pas dessus mais autour, n’est-ce pas ?!), les enfants tentent de maîtriser leurs mouvements, défendent leur espace (aussi courtoisement que leur maîtrise d’eux et d’elles-mêmes le permet !), écoutent attentivement (ou pas), demandent la parole (ou la prennent sans demander). Chacun et chacune s’essaye à ce moment de collectivité qui, pour bien fonctionner, suit quelques règles. Chacun et chacune s’essayent à trouver sa place, à exister, à s’exprimer devant les autres, à prendre confiance, à patienter, à recevoir une information importante, à chanter, à danser, à célébrer un ou une camarade dont c’est l’anniversaire…
Présentations collectives
Le regroupement de tous les enfants, ou d’une partie des enfants (oui, on peut faire des regroupements non obligatoires afin de respecter la concentration des enfants engagé·es dans leur travail), est un contexte privilégié pour présenter des saynètes de grâce et courtoisie ; pour présenter : une expérience de science, l’activité marcher sur la ligne, la leçon du silence ; inviter les enfants au (non montessorien !) “montre et raconte” ou encore proposer des activités ludiques de langage (jeux, chants). Le calendrier et la météo sont-ils un passage obligé ? doivent-ils se faire en groupe notamment dans un contexte montessorien ? Je vous invite à challenger toute habitude et réflexe de ces temps de regroupement à la lumière de l’intérêt pédagogique pour les enfants.
Les modalités du regroupement
Choisir le bon moment
Si l’on décide d’organiser un ou des regroupements, on veille à ne pas perturber la période de travail (2h30-3h00 sans interruption). Même si certains temps de regroupement informels peuvent se faire spontanément pendant la période de travail et pour répondre à un besoin de gestion de groupe, surtout en présence d’un groupe non normalisé (lecture, cuisine, ou autre activité pertinente proposée par l’assistant·e Montessori). En présence d’un groupe plus normalisé, attention en revanche à ne pas se laisser effrayer par le phénomène de fausse fatigue, au contraire, il est essentiel de laisser passer ce moment d’agitation en conservant la configuration de la période de travail individuel afin de permettre qu’une nouvelle période de concentration s’installe. Pour les temps de rassemblement, il est recommandé de privilégier les moments de transitions : avant ou après le repas par exemple.*
Réfléchir à ma posture durant le regroupement
Dans la poursuite de l’objectif d’acquisition de compétences sociales et dans le respect des besoins des enfants, il est important de réfléchir à sa posture et à la place que l’on offre aux enfants, à leur parole, à leur spontanéité. Est-ce à moi seul·e de définir l’ordre du jour d’un temps collectif, par exemple ? Comment organiser la prise de parole ?
Adapter la durée des regroupements
Si l’on se base sur le temps d’attention des jeunes enfants défini par la recherche scientifique, afin que le regroupement soit un moment profitable et non une contrainte désagréable et sans intérêt pédagogique, on peut proposer un regroupement d’environ :
6 minutes à des enfants de 3 ans
8 minutes à des enfants de 4 ans
10 minutes à des enfants de 5 ans
12 minutes à des enfants de 6 ans
J’espère que ces pistes nourriront réflexion et réassurance dans notre pratique. Gardons en tête que ces moments collectifs doivent être vécus de manière positive par les enfants. Chez AIRAM, nous formons nos stagiaires en ce sens : si nous choisissons de faire des regroupements, identifions clairement nos objectifs, préparons bien ces temps et employons-nous à en faire des moments attrayants et chaleureux !
Très bon début d’année scolaire à tous et toutes.
Jeanne, de l’équipe d’AIRAM Montessori.
*A noter que le fonctionnement attentionnel de l’enfant varie également en fonction du moment de la journée. Pour approfondir cette question, voir : Fonctionnement attentionnel et chronopsychologie : quelques données actuelles chez l’enfant de maternelle et primaire, Claire Leconte-Lambert, 1994.
Bonsoir Madame, Monsieur,
Intéressant ces idées de temps par tranche d’âge. Dans les classes Montessori, les classes sont en multi-âge. Comment gérer la durée des temps de regroupement avec ce paramètre ?
Merci
Bonjour,
Je vous remercie pour votre question pertinente qui pointe un défaut de clarté dans mon propos.
Je souhaitais donner cette information du temps, très limité, pendant lequel on peut attendre des jeunes enfants qu’ils et elles nous accordent leur attention dans le contexte d’un regroupement comme base de réflexion pour l’organisation de ces temps collectifs.
Dans le contexte multi-âge, planifier un regroupement avec des enfants de 3, 4 et 5 ans par exemple, impliquera que l’on se fixe le temps maximum d’attention que peut nous accorder l’enfant le ou la plus jeune, c’est-à-dire 3 ans. En revanche, on peut prévoir, pendant la sieste des plus jeunes, un temps collectif un tout petit plus long, toujours calé sur le développement de l’enfant présent le ou la plus jeune.
Simplement avoir cette information en tête est, il me semble, utile pour se fixer des objectifs raisonnables et respectueux des enfants.
J’espère que cela répond à votre questionnement.