« L’enfant devient bon et responsable »… est-ce une idée de quelqu’un fan de la méthode, même si l’on peut imaginer que cette méthode aide au développement….ou a t’on réellement des statistiques portant sur l’évolution des enfants ayant pratiqué cette méthode ?
Résumé des études conduites sur les différences entre enfants en école Montessori et enfants en école conventionnelle
Ce document s’appuie sur le travail de thèse de Philippine Courtier*, intitulé L’impact de la pédagogie Montessori sur le développement cognitif, social et académique des enfants en maternelle.
De nombreuses études ont été menées au XXème siècle sur la comparaison des élèves de classe Montessori et élèves en conventionnel, cependant nous avons fait le choix de nous focaliser sur les études les plus récentes, plus représentatives, à notre sens, de la réalité.
Depuis plusieurs années, Lillard (LA grande référence dans les études portant sur les élèves Montessori) et collaborateurs évaluent l’impact de la pédagogie Montessori, à la fois sur les apprentissages, mais aussi sur le développement des enfants aux Etats-Unis (Lillard & Else-Quest, 2006; Lillard, 2012; Lillard & Heise, 2016; Lillard et al., 2017; Taggart, Fukuda, & Lillard, 2018).
Dans une première étude publiée en 2006, Lillard et Else-Quest se sont intéressées aux :
Effets de la pédagogie Montessori sur les performances d’élèves en fin de maternelle et en fin d’élémentaire.
Les auteures ont testé un groupe d’élèves âgés de 5 ans, dont 30 en classes Montessori et 25 en classes conventionnelles, ainsi qu’un autre groupe d’élèves âgés de 12 ans, dont 29 en classes Montessori et 28 en classes conventionnelles.
Les classes Montessori étaient situées dans des écoles affiliées à l’AMI. Elles ont évalué les élèves avec différentes mesures de compétences cognitives, académiques et sociales, puis ont comparé leurs performances transversalement.
- En ce qui concerne les compétences cognitives à 5 ans, les élèves des classes Montessori avaient de meilleurs résultats au test de flexibilité cognitive que les élèves des classes conventionnelles (d= 0,61), mais les deux groupes ne présentaient pas de différence en inhibition, ainsi qu’aux trois tests évaluant le raisonnement (voir Figure 7 pour tous les résultats significatifs de cette étude).
- Concernant ce même groupe d’âge, les compétences académiques étaient supérieures pour les élèves Montessori pour la résolution de problèmes mathématiques (d= 0,55), la lecture (d= 0,44) et la phonologie (d= 0,63), et équivalentes entre les deux groupes pour le vocabulaire.
- Les élèves des classes Montessori avaient également de meilleures compétences en cognition sociale que les élèves des classes conventionnelles. Ceci était observable sur le test de théorie de l’esprit (d= 0,61), sur la proportion de réponses basées sur le principe de justice pour résoudre un problème social25 (d= 0,89), ainsi que sur la qualité des interactions des élèves pendant la récréation. En effet, des observations réalisées par les expérimentatrices ont révélé une plus grande proportion de jeu bienveillant entre pairs. Par exemple : « Tu dois partager ! », « On échange ? » ou « Est ce que je peux l’emprunter ? ». (d= 0,58) et moins de jeu de bousculade ambiguë (d= 0,72). Enfin, les scores des deux groupes ne différaient pas dans le questionnaire de bien-être.
- A 12 ans, les élèves en Montessori rédigeaient des histoires plus créatives (d= 0,71) et avec des structures de phrases plus sophistiquées (d= 0,59). Cependant, les histoires des enfants des deux groupes ne présentaient pas de différence en orthographe, ponctuation et grammaire. Les élèves de 12 ans du groupe Montessori avaient également de meilleures compétences sociales (d= 0,73) et exprimaient un meilleur bien-être scolaire (d= 0,54). Cependant, il n’y avait toujours pas de différence entre les groupes dans les tâches de raisonnement. Les résultats ont également révélé, contrairement aux groupes d’élèves âgés de 5 ans,qu’ il n’y avait pas de différence entre les groupes dans les différentes tâches de mathématiques et de langage (c’est-à-dire, en lecture, phonologie et vocabulaire). En résumé, selon les résultats de Lillard et Else- Quest (2006), la pédagogie Montessori permettrait de meilleurs résultats académiques que la pédagogie conventionnelle en maternelle, alors qu’aucune différence ne serait observable au niveau élémentaire. Leur étude semble démontrer que les élèves en classes Montessori ont de meilleures compétences sociales et exécutives que les élèves en classes conventionnelles, ce qui n’avait pas été étudié dans les études précédemment exposées.
Dans une étude longitudinale ultérieure, Lillard, Heise, Richey, Tong, Hart et Bray (2017) ont comparé :
Les progrès d’élèves en écoles maternelles Montessori ou conventionnelles.
- Les élèves étaient aussi assignés à l’école Montessori ou au groupe contrôle en fonction de leur acceptation par loterie. Les élèves du groupe Montessori (n= 70) étaient répartis dans 11 classes en triple niveau parmi deux écoles publiques magnet Montessori reconnues par l’AMI.
- Les élèves du groupe contrôle (n= 71) étaient quant à eux répartis dans 71 écoles conventionnelles. Trente de ces écoles étaient des écoles publiques (dont 15 magnet26, 8 classiques et 7 Head Start), et 41 étaient des écoles privées. L’échantillon présentait une grande variété de niveaux de revenus et d’éducation parentale, mais les deux groupes ne différaient pas dans ces variables démographiques. Tous les enfants étaient testés au moins trois fois parmi les quatre sessions de tests au cours de leurs trois années de maternelle : une fois en début de Petite Section Maternelle (PSM) (T1), puis une fois à la fin de chaque année scolaire.
- Les écoles « magnet » sont des écoles publiques qui bénéficient de fonds supplémentaires de l’Etat et qui proposent des enseignements spécialisés. Leur admission est opérée par un système de loterie et leur objectif est de favoriser la mixité sociale en attirant à la fois des élèves aisés et défavorisés.
Les tests correspondaient à une batterie de mesures évaluant des compétences similaires à celles de l’étude précédente, avec quelques ajouts, tels qu’une évaluation de la persévérance face à l’effort (c’est-à-dire la résolution d’un puzzle impossible) et de la créativité. Par ailleurs, pour analyser statistiquement les résultats, les auteurs ont regroupé plusieurs mesures en facteurs uniques. D’abord, les auteurs ont regroupé les performances aux tests langagiers (vocabulaire et lecture) et mathématiques (résolution de problème et calcul) dans une même mesure dite de « compétences académiques ».
Ensuite, ils ont regroupé une tâche évaluant l’inhibition comportementale et une tâche d’habileté visuo-spatiale (copie de figure) en un facteur dît de « fonctions exécutives ». Nous verrons également que divers tests statistiques ont été réalisés (c’est-à-dire courbe de croissance, ANCOVA et t-tests ou tests de Fisher) pour analyser de mêmes résultats. Etant donné que les données descriptives ne sont pas reportées, la lecture des résultats de l’étude est rendue assez complexe.
- Les analyses menées à T1 ont révélé qu’il n’y avait pas de différence initiale entre les groupes aux différents tests évalués. Leurs auteurs ont ensuite observé que, comparés aux élèves du groupe contrôle, les élèves du groupe Montessori progressaient davantage dans le score global de compétences académiques (d= 0,41 à T4) et dans le test de théorie de l’esprit (d= 0,32 à T4). Par ailleurs, ils se montraient plus persévérants face à l’effort à T3 et T4 (65% d’élèves Montessori contre 47% d’élèves contrôle) et les élèves en classes Montessori de tous les niveaux confondus reportaient en moyenne davantage aimer les tâches scolaires que les élèves du groupe contrôle.
Néanmoins, le test de créativité a révélé des résultats similaires entre les deux groupes à chaque temps d’évaluation. Par ailleurs, contrairement aux résultats de leur étude transversale précédente (Lillard & Else-Quest, 2006), il n’y avait pas de différence entre les deux groupes concernant la proportion de références à la justice pour résoudre un problème social et les fonctions exécutives. Les différentes compétences académiques n’étant pas examinées individuellement, il est difficile de comparer ces résultats à ceux de l’étude précédente concernant l’apprentissage de la lecture et des mathématiques. Les données ont ensuite également fait l’objet d’analyses exploratoires complémentaires par les auteurs.
Analyses exploratoires tenant compte de la classe sociale à laquelle appartiennent les élèves
Premièrement, les différences dans le score global de 101 compétences académiques ont été évaluées en fonction du SES (classe sociale) des élèves. Pour cela, le groupe Montessori et le groupe contrôle ont été divisés en deux sous-groupes, « haut revenu » et « faible revenu », en fonction de s’ils étaient respectivement au-dessus ou en dessous du revenu parental médian. Les résultats ont révélé que le groupe contrôle à haut revenu était meilleur que le groupe Montessori à faible revenu à T1 (d= 0,61) et à T2 (d= 0,61), et que ces deux sous-groupes avaient finalement des résultats similaires à T4 (voir Figure 8). Par ailleurs, le groupe Montessori à faible revenu obtenait un score plus élevé que le groupe contrôle à faible revenu à T4 alors que ce n’était pas le cas à T1.
Figure 8 : Graphique des progrès académiques des élèves en classes Montessori (en bleu) et conventionnelles (en noir), de SES élevé (ligne pleine) ou faible (ligne pointillée) extrait de Lillard et al. (2017).
Deuxièmement, les résultats académiques des groupes ont été comparés en fonction du niveau de fonctions exécutives des enfants. Dans les deux groupes, un niveau plus élevé de fonctions exécutives prédisait les compétences académiques à T1. En revanche, le niveau de fonctions exécutives prédisait aussi les progrès des compétences académiques pour le groupe contrôle mais pas pour le groupe Montessori. Ainsi, les enfants Montessori avec de faibles fonctions exécutives réussissaient aussi bien académiquement que les enfants Montessori avec des fonctions exécutives élevées. Les auteurs émettent l’hypothèse que les élèves en classes Montessori auraient moins besoin de recruter leurs fonctions exécutives pour réussir, car c’est l’enseignement qui s’adapte à leur rythme d’apprentissage. Néanmoins, dans leurs études antérieures, Lillard et collaborateurs (2006, 2012) avaient bien obtenu des différences de fonctions exécutives entre les enfants en classes Montessori et en classes conventionnelles. Cette conclusion nécessite donc d’être confirmée car le lien entre fonctions exécutives et réussite scolaire n’avait pas été étudié précédemment.
Rathunde, K., “A Comparison of Montessori and Traditional Middle Schools : Motivation, Quality of Experience, and Social Context,” The NAMTA Journal 28.3 (Summer 2003): pp. 12-52.
Cette étude a comparé les élèves des collèges Montessori avec les élèves des collèges traditionnels et a révélé une motivation et une socialisation nettement plus élevées parmi les élèves Montessori. «Il y avait de fortes différences suggérant que les étudiants Montessori se sentaient plus actifs, forts, excités, heureux, détendus, sociables et fiers lorsqu'ils étaient engagés dans des travaux universitaires. Ils s'amusaient aussi davantage, ils étaient plus intéressés par ce qu'ils faisaient et ils voulaient faire des travaux académiques plus que les étudiants traditionnels.
*Philippine Courtier. L’impact de la pédagogie Montessori sur le développement cognitif, social et académique des enfants en maternelle. Psychologie et comportements. Université de Lyon, 2019. Français. ffNNT : 2019LYSE1286ff. fftel-02454499f
Nous pouvons dire, d'après ces statistiques, que les enfants Montessori sont plus engagés dans ce qu'ils font et ont plus de créativité. Leurs compétences académiques est plus démarquées que chez les enfants des écoles traditionnelles, et surtout pour les enfants de maternelle.
Nous pouvons dire que, de façon générale, les enfants Montessori sont plus dynamiques, plus intéressés, plus investis dans leur travail que les enfants des écoles conventionnelles. Ils auraient également une approche plus simple et ciblée en mathématiques et une créativité plus marquée en rédaction d'histoires.
Ils seraient plus attentifs aux autres, bienveillants et auraient plus confiance en eux. De façon générale, les enfants Montessori aiment plus aller à l'école que ceux des écoles conventionnelles.
Pour un appui scientifique aux principes montessoriens, voyez le livre d'Angeline Stoll Lillard, en français : Une révolution pédagogique soutenue par la science, c'est une mine de référence à des recherches scientifiques.
Retrouvez la traduction d'une interview d'Angeline Stoll Lillard réalisée par AIRAM ici.
Voyez aussi les travaux de Solange Denervaud et de Mary Helen Immordino-Yang.
Et, l'étude de Courtier, bien sûr, première mondiale car première étude "longitudinale randomisée" pour comparer l'enseignement traditionnel tel que structuré dans l'Education nationale et la pédagogie Montessori.